Papotons au salon - Avril 2014 (3)

Une gare à Paris

Le flux et le reflux habituel de toute gare : tous ces gens qui débouchent de partout, traînant leur valise. Un peu déboussolés pour certains, ils scrutent les tableaux d’affichage des départs et des arrivées, vérifient cent fois leur billet, se dépêchent d’aller acheter un magazine ou un truc à grignoter pour passer le temps et le stress du voyage.

Je me suis moi aussi engouffrée dans cette gare et j’ai rejoint le niveau des départs.

Je comptais me rendre dans le salon réservé aux « grands voyageurs » et qui permet de s’isoler un peu de la cohue et du brouhaha ambiant.

Fuir la foule.

En traversant le hall j’ai entendu une musique. J’ai d’abord pensé que la SNCF menait une opération de promotion quelconque.

Mais plus j’avançais et plus le son était fort.

Un piano.

Je me suis souvenue alors qu’en descendant du train ce matin tôt, j’avais remarqué ce piano posé là, au milieu de rien, avec juste une affiche posée dessus sur laquelle était écrit : A vous de jouer !

 

C’était bien cela.

Un jeune homme était assis sur le tabouret et jouait du piano.

Je me suis approchée.

C’était visiblement un voyageur en attente de son train : sa valise était posée à côté de lui.

Il jouait très bien et enchaînait rapidement toutes sortes d’airs connus et accrocheurs.

Il y avait le piano, ses mains courant sur le clavier et son sourire.

Il jouait et souriait.

Les gens passaient.

Certains continuaient leur course effrénée mais la plupart ralentissaient le pas.

Et d’autres s’arrêtaient.

Un cercle se forma autour de lui.

Je vis quelques pieds frapper la cadence.

Une vieille dame se mit soudain à esquisser quelques pas de danse.

J’observais ce petit groupe de mélomanes : ils souriaient.

Ils se souriaient aussi lorsque leurs regards se croisaient tout en écoutant la musique.

Une dame à côté de moi me dit : « qu’est-ce qu’il joue bien ! »

Nous échangeâmes quelques mots… et un sourire !

Nous ne nous serions sûrement même pas regardées en d’autres circonstances !

Je suis finalement restée là, à écouter de la musique avec d’autres personnes que je ne reverrai sans doute jamais. Mais nous étions bien là, ensemble.

Ce n’est que l’heure de mon train qui m’a décidé à reprendre ma route.

En souriant.

Je suis montée dans mon wagon.

J’ai trouvé ma place.

J’ai croisé le regard de mon voisin d’en face.

Je lui ai souri.

Il a souri aussi.

Serait-ce contagieux ?

Il semblerait que oui !

Il faudrait vérifier…

Voulez-vous faire le test ?

Vous nous direz ce que cela donne !